Le défenseur des droits humains au Pérou s’inquiète des menaces voilées sur les plateformes de Meta
27 mai 2025
Le Conseil de surveillance renverse la décision de Meta de laisser en ligne des contenus visant l’une des principales défenseures des droits humains au Pérou. Les restrictions aux libertés fondamentales, telles que le droit de réunion et d’association, augmentent au Pérou, et les organisations non gouvernementales (ONG) sont parmi les plus touchées. La publication a été partagée par un membre de La Resistencia et contient une image de la défenseure qui a été modifiée, probablement par l’IA, pour montrer du sang coulant sur son visage. Ce groupe cible les journalistes, les ONG, les militants des droits humains et les institutions au Pérou par la désinformation, l’intimidation et la violence. Prise dans son contexte global, cette publication a été qualifiée de « menace voilée » conformément à la politique en matière de violence et d’incitation. Comme ce cas révèle une sous-application potentielle des menaces voilées et codées sur les plateformes de Meta, le Conseil fait deux recommandations connexes.
À propos du cas
Un membre de La Resistencia a publié une image probablement manipulée par l’IA, dans laquelle la tête d’une dirigeante d’une organisation de défense des droits humains a été modifiée pour montrer son visage couvert de sang. Une légende en espagnol insinue que les organisations non gouvernementales (ONG) commettent des malversations financières en recevant des fonds étrangers, et les accuse également d’encourager les violentes manifestations. Au moment où cette publication a été partagée, des civils péruviens manifestaient contre le gouvernement.
Vue environ 1 000 fois, la publication a été signalée. Meta a déterminé qu’il n’y avait pas de violation. L’utilisateur qui avait fait appel à Meta s’est alors adressé au Conseil. Avant que le Conseil ne sélectionne le cas, Meta a reçu un rapport de l’un de ses partenaires de confiance, un réseau mondial d’ONG, d’agences humanitaires et de chercheurs en droits humains qui signalent les risques émergents liés aux contenus sur les plateformes de Meta. En conséquence, Meta a examiné le compte qui avait publié l’image et l’a désactivé pour violation de ses conditions d’utilisation, ce qui signifie que cette publication spécifique n’est plus sur Facebook.
Principaux constats
Le Conseil a estimé à l’unanimité que cette publication constituait une « menace voilée ou implicite » conformément au Standard de la communauté en matière de violence et d’incitation. Lorsque des menaces sont voilées, elles nécessitent un signal de menace - tel qu’une déclaration de représailles ou un appel à l’action - et un signal de contexte, y compris des experts locaux confirmant que la déclaration pourrait conduire à une violence imminente.
L’image manipulée par l’IA a une cible : la défenseure des droits humains, clairement identifiable par de nombreux Péruviens. Son image a été modifiée pour donner l’impression qu’elle a subi des blessures physiques. Le texte énonce des griefs à l’encontre des ONG, y compris des prétendues malversations financières. L’ensemble de ces éléments répond aux exigences d’un signal de menace. Le contenu répond également à la nécessité d’un signal de contexte, puisque les attaques contre les défenseurs des droits humains, y compris par La Resistencia, sont bien connues au Pérou. En outre, le rapport du partenaire de confiance envoyé à Meta souligne comment cette publication aurait pu contribuer à une violence imminente.
Meta a interprété cette image comme celle d’une défenseure des droits humains ayant du « sang sur les mains ». Le Conseil n’est pas convaincu et est déçu par cette explication, notant que l’image est altérée pour indiquer une plaie saignante à la tête. Les équipes internes de Meta auraient pu facilement découvrir que la défenseure est reconnaissable en effectuant une recherche en ligne, ce qui aurait fait apparaître sa photo originale souriante.
Aucune intervention autre que la suppression du contenu n’aurait pu atténuer de manière adéquate les risques encourus par la défenseure des droits humains dans ce cas. Des rapports récents des Nations unies ont évoqué l’environnement peu sûr pour les défenseurs des droits humains, en particulier les femmes, au Pérou. La stigmatisation des groupes de la société civile a créé une atmosphère de peur, et cette dynamique a été exacerbée par des initiatives législatives visant à renforcer le contrôle sur les ONG à restreindre les rassemblements pacifiques.
Enfin, le Conseil a reçu des rapports indiquant que ce contenu a été republié par d’autres comptes associés à l’utilisateur qui l’avait initialement publié. Meta devrait veiller à ce que ces publications soient supprimées, à moins qu’il ne s’agisse d’une condamnation ou d’une sensibilisation.
Décision du Conseil de surveillance
Le Conseil de surveillance renverse la décision de Meta de laisser le contenu en ligne.
Le Conseil recommande également à Meta de :
- Préciser que les « déclarations codées où la méthode de violence n’est pas clairement articulée » sont interdites sous forme écrite, visuelle et verbale, conformément au Standard de la communauté en matière de violence et d’incitation.
- Produire une évaluation annuelle précise des menaces voilées potentielles, en mettant l’accent sur les contenus contenant des menaces contre les défenseurs des droits humains qui restent à tort sur la plateforme et sur les cas où des discours politiques sont retirés à tort.
Pour plus d’informations
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