Le Conseil doit examiner la conformité de Meta à la liberté d’expression politique au Kenya
3 juin 2025
Le Conseil annonce aujourd’hui qu’il va examiner un nouveau cas. Dans ce cadre, nous invitons individus et organisations à soumettre des commentaires publics en cliquant sur le bouton ci-dessous.
Sélection des cas
Comme nous ne pouvons pas entendre tous les appels, le Conseil accorde la priorité aux cas susceptibles d’affecter de nombreux utilisateurs à l’échelle internationale, qui revêtent une extrême importance dans le débat public ou qui soulèvent des questions essentielles par rapport aux politiques de Meta.
Le cas que nous annonçons aujourd’hui est le suivant :
Commentaire sur la politique kenyane utilisant une insulte désignée
2025-023-FB-UA
Appel d’un utilisateur pour restaurer du contenu
Soumettez un commentaire public en cliquant sur le bouton ci-dessous.
En février 2025, un utilisateur de Facebook a commenté une publication portant sur la candidature de l’ancien Premier ministre kenyan Raila Odinga à l’élection du président de l’Union africaine. Les deux publications sont rédigées en grande partie en anglais, avec quelques mots en swahili.
La publication Facebook contient une photo de Rigathi Gachagua, ancien vice-président du Kenya (2022-2024), avec un texte superposé citant le soutien de Gachagua à Odinga et indiquant pourquoi son succès à l’élection serait une bonne chose pour le continent africain. La légende affirme que Gachagua, qui appartient à l’ethnie Kikuyu, soutient Odinga, qui appartient à l’ethnie Luo, pour plaire à l’électorat Luo de Odinga et pour accroître sa propre popularité en vue d’un gain politique interne. La légende suggère que les Luo sont crédules et qu’ils voteraient pour toute personne qui profite à Odinga, y compris pour des politiciens d’autres groupes ethniques prétendument responsables des violences commises contre les Luo dans le passé.
Le commentaire de l’utilisateur sur la publication tourne en dérision la réaction à la déclaration de Gachagua et rejette son explication comme destinée aux « tugeges », en référence aux partisans Kikuyu de Gachagua. Le commentaire affirme que le soutien de Gachagua est destiné à un public extérieur plutôt qu’à un public kenyan.
Meta a supprimé le commentaire de l’utilisateur pour avoir enfreint le Standard de la communauté en matière de comportements haineux et a laissé la publication commentée par l’utilisateur en ligne. Meta a désigné le terme « tugeges » comme une insulte interdite en vertu de cette politique en janvier 2024, après que le terme ait gagné en popularité lors des élections présidentielles de 2022. Meta traduit « tugeges » par « Kikuyus attardés », notant qu’il s’agit de la forme plurielle de « kagege », qui est un terme Kikuyu décrivant « une personne extrêmement confuse au point de regarder le monde d’un air vide ». Meta note que le terme provient du mot « gega », qui signifie « regarder avec perplexité ».
En vertu du Standard de la communauté en matière de comportements haineux, Meta supprime les contenus qui « décrivent ou ciblent négativement des personnes au moyen d’insultes ». Meta définit les insultes comme « des mots qui créent intrinsèquement une atmosphère d’exclusion et d’intimidation à l’encontre de personnes sur la base d’une caractéristique protégée, souvent parce que ces mots sont liés à la discrimination, à l’oppression ou à la violence historiques ». La politique prévoit une exception pour les contenus qui utilisent des insultes pour condamner un discours incitant à la haine, le dénoncer, se le réapproprier ou lorsqu’il est utilisé pour faire référence à soi-même.
Les systèmes automatisés de Meta ont détecté l’utilisation d’une insulte dans le contenu et ont déterminé qu’il s’agissait d’une violation, ce qui a entraîné la suppression du commentaire et une radiation standard du compte de l’utilisateur qui a commenté. L’utilisateur a fait appel de la décision de Meta de supprimer son commentaire. Un examinateur manuel a confirmé que le contenu était contraire à la norme, et le commentaire n’a donc pas été restauré.
L’utilisateur qui avait publié le commentaire a alors fait appel au Conseil de surveillance. Dans sa déclaration au Conseil, l’utilisateur a indiqué qu’il n’avait pas insulté, menacé ou utilisé un langage abusif dans son commentaire. Il répondait simplement à la publication « de manière civile » et faisait un simple commentaire politique.
Le Conseil a choisi ce cas pour examiner le respect de Meta en matière de liberté d’expression politique dans les pays avec un passé récent de violence intercommunautaire. Ce cas relève de la priorité du Conseil en matière de discours incitant à la haine envers les groupes marginalisés.
Le Conseil aimerait recevoir des commentaires publics sur ce qui suit :
- La signification du terme « tugeges » et son utilisation contemporaine dans la politique et la société kenyanes, y compris la preuve de son lien avec des préjudices ou l’absence de ceux-ci.
- Le contexte politique au Kenya, y compris la situation de la liberté d’expression en ligne et les risques liés à l’incitation à la violence intercommunautaire.
- La manière dont l’ethnicité est abordée dans le cadre de l’actualité au Kenya, et la prévalence d’un langage contesté ou potentiellement insultant ou de généralisations dans le discours de tous les jours.
- L’impact de l’application automatisée de la politique de Meta en matière de comportements haineux sur les droits humains, y compris la liberté d’expression, en particulier dans les pays avec un passé récent de violence intercommunautaire.
Dans le cadre de ses décisions, le Conseil peut émettre des recommandations sur les politiques de Meta. Bien que ces recommandations ne soient pas contraignantes, Meta doit y répondre dans un délai de 60 jours. Aussi le Conseil encourage-t-il à l’envoi de commentaires publics qui suggèrent des recommandations pertinentes dans ce cas-ci.
Commentaires publics
Si vous ou votre organisation estimez que votre point de vue est opportun et qu’il pourrait aider le Conseil à prendre une décision dans le cas annoncé aujourd’hui, vous pouvez soumettre vos contributions en cliquant sur le bouton ci-dessous. Veuillez noter que les commentaires publics peuvent être envoyés de manière anonyme. Le délai de soumission des commentaires publics est de 14 jours ; il prendra fin le mardi 17 juin à 23 h 59, heure du Pacifique (PST).
Prochaines étapes
Au cours des prochaines semaines, les membres du Conseil délibéreront sur ce cas. Lorsque le Conseil aura statué sur ces cas, nous publierons sa décision sur la page Décisions.